Axe 1 – Séminaire « Penser au présent, penser en contexte. Contextualisation, contemporanéité et historicité »

 

Ce séminaire*, qui fédère les différentes orientations du Centre Prospéro, débutera en 2022-2023, pour un cycle de 3 années.

*Depuis 2021, vous pouvez retrouver sur notre chaine youtube, les enregistrements de la plupart des séances du séminaire principal.

 

.

Tout au long de son histoire, la philosophie occidentale s’est interrogée sur le point de vue et la position d’énonciation à partir desquels elle a construit ses savoirs. Il est manifeste que ce geste d’autoréflexivité est au fondement même de toute théorie de la connaissance. La littérature, et l’art de manière générale, en ont fait autant, renouvelant sans cesse, au sein même de leurs pratiques, les modalités singulières de mise en scène de leur propre énonciation, de ses conditions de possibilité et de celles de leur autonomie.

Aujourd’hui, tout particulièrement, la mise en examen du contexte d’énonciation permettant de produire un énoncé, de sa structure et de sa légitimation, est au cœur de bon nombre de réflexions et de travaux philosophiques, mais elle a également des répercussions dans des champs disciplinaires variés. De surcroît, opérer un retour réflexif sur sa position d’énonciation suppose également d’être à même de se situer en tant que sujet de l’histoire : s’interroger sur la contemporanéité de son point de vue, sur ce qui fonde cette contemporanéité et ce qu’elle entraîne comme conséquences, geste nécessaire pour mettre en perspective toute interprétation des productions discursives passées et présentes.

Au-delà de sa dimension épistémologique, ce questionnement ne peut manquer de susciter, dans le champ des savoirs, débats et controverses. Il suffit de songer à tous ceux que génère dans l’actualité la survivance de certaines œuvres du passé, celles qui heurtent nos sensibilités, notre terminologie, nos croyances et nos valeurs d’aujourd’hui : comment poser un geste herméneutique qui, sans oblitérer le propos ni se contenter de renvoyer l’œuvre aux erreurs de l’histoire, fasse droit à ce qui en elle peut nous être contemporain ? On songera également à ces actes d’autocensure que l’époque s’impose à elle-même, le plus souvent dans le silence et le sous-entendu, à ces strates idéologiques sur lesquelles, à notre insu, nous construisons ce que nous pouvons dire, voir ou savoir, et à partir desquelles nous oublions tout aussi bien les angles morts de notre pensée.

Autant d’interrogations que suscite cette situation, fondamentale, à laquelle nous ne pourrons jamais échapper : puisqu’il ne nous est pas davantage possible d’être partout que d’être nulle part, puisqu’il nous faut penser à partir d’un ici et d’un maintenant, il s’agit d’en prendre conscience et de tenter de rendre explicite ce que nous pouvons et ce que nous ne pouvons pas savoir ; assumer ce qu’implique penser à partir du présent et du contexte que nous nous forgeons. Pour nourrir ce questionnement et le séminaire au fil duquel il sera développé, trois pistes de réflexion complémentaires sont proposées, qui seront abordées à l’aide de différentes disciplines, traditions de pensée et outils théoriques.

  1. Épistémologie : contexte, discours et position d’énonciation. Dans ce premier axe seront abordées des questions épistémologiques liées à l’influence du contexte d’énonciation sur le texte, à l’examen de la position d’énonciation du discours, ou encore au courant du contextualisme en philosophie du langage.
  2. Historicité :  anachronisme et « euchronie ». Comment prendre en considération l’historicité de son point de vue ; comment comprendre, donner sens à une œuvre du passé (littéraire, artistique, scientifique), fût-il tout récent, si ce n’est dans un mouvement à fois anachronique et « euchronique », c’est-à-dire à partir d’un point de vue actuel, dans un mouvement arrachant, pour une part du moins, l’œuvre à son époque de production ?
  3. Politique : qu’est-ce qu’être contemporain ? Comment penser une contemporanéité qui, tout en ne renonçant pas affirmer les traits et les enjeux propres à son époque, ne se conçoive pas comme exclusive de toute pensée qui dénote ou dérange, de tout accident ou aspérité de sa propre histoire ? Il s’agira de déplier les effets politiques et éthiques du questionnement sur ce que signifie, aujourd’hui, penser en contemporain et en contexte, penser ici et maintenant.

8
décembre

Séminaire Prospéro - Marc Escola (Université de Lausanne), Le cinéma au siècle des Lumière(s)

– 08/12/2023 – de 14:00 à 17:00

Salle P61, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

12
janvier

Séminaire Prospéro - Florian Tréguer (Université Rennes 2), Le sublime paranoïaque et le cinéma américain

– 12/01/2024 – de 14:00 à 17:00

Salle P61, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

16
février

Séminaire Prospéro - Matilde Manara (Université de Strasbourg), "Comparer au milieu des morts". Quand un corpus se change en canon

– 16/02/2024 – de 14:00 à 17:00

Salle P61, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles et en ligne via Teams.

17
mai

Séminaire Prospéro - Alicia Hostein (Smith College, Genève), Quelques remarques inactuelles sur les préjugés

– 17/05/2024 – de 14:00 à 17:00

Salle P61, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

1 2

Axe 2 – Théorie de la littérature, théorie par la littérature

 

Cet axe de recherche, débutant en septembre 2019, se concentrera sur des problématiques propres au domaine de la théorie de la littérature ou de la philosophie de la littérature. Au sein d’un séminaire de recherche organisé dans le cadre de cet axe, on travaillera sur des concepts ou notions qui constituent les outils que mobilisent les études littéraires ou l’analyse littéraire.

À partir de l’année académique 2020-2021, ce séminaire sera consacré au thème « Littérature et cartographie ».

On le sait, depuis le « Spatial Turn » qu’ont connu – notamment – les études littéraires, les travaux visant à analyser les rapports de la littérature à l’espace, et plus particulièrement à la cartographie, sont nombreux. Différentes approches de la carte par la littérature ont ainsi vu le jour : approches thématiques étudiant les textes dans lesquels sont mises en scène des cartes, approches visant à tracer la carte des lieux référentiels d’un récit, études des « cartes mentales » suggérées par les œuvres littéraires, approches géocritiques et géopoétiques,… Tout en restant ouvert à ces différentes démarches, le séminaire aura pour objectif principal d’explorer une voie différente et complémentaire, basée sur l’hypothèse selon laquelle la cartographie, en tant que système de représentation de l’espace, utilise des logiques et des procédés de représentation que l’on peut comparer à ceux que met au point la littérature dans ses différents rapports à l’espace (espace diégétique, mais aussi espace « énonciatif », positionnement dans le champ discursif, etc.). C’est la fécondité heuristique de ce postulat que le séminaire aura pour objectif de tester, en le confrontant à l’analyse d’œuvres littéraires – voire d’œuvres issues d’autres champs artistiques, à titre de comparaison ou de contrepoint – qui seront choisies par les participants. Le champ de la littérature contemporaine de langue française sera sans doute le mieux représenté, mais l’analyse d’œuvres d’autres langues et époques est également bienvenue.

Le séminaire accueillera toutes les personnes intéressées par le sujet, que celles-ci souhaitent ou non prendre en charge la présentation d’une séance. Dans la mesure du possible, les textes étudiés seront communiqués avant les séances.

Ce séminaire s’inscrit dans le cadre de l’axe « Théorie de la littérature, théorie par la littérature » du Centre Prospéro. Langage, image et connaissance, ainsi que d’un projet de recherche (PDR) financé par le F.R.S.-FNRS.

15
janvier

Appel à contributions "Littérature et cartographie numérique : gestes d’écriture contemporains"

– 15/01/2024 – de 00:00 à 23:59

Colloque international
UCLouvain Saint-Louis Bruxelles
6 et 7 juin 2024

Dans leur processus d’écriture, les auteurs ont bien souvent recours à des cartes géographiques, pour fournir une assise référentielle au récit, pour apporter un surcroît de vraisemblance aux descriptions spatiales ou encore pour consolider une enquête de terrain – les dossiers génétiques des œuvres de Stendhal, Hugo, Zola, Giono ou encore Claude Simon le prouvent volontiers[1].

Depuis près de deux décennies, cette pratique a connu un infléchissement majeur, lié à l’émergence de la cartographie en ligne. Celle-ci, associant images satellite et données géolocalisées, n’est pas passée inaperçue des auteur.e.s qui, conscients de ses potentialités inédites, n’ont pas manqué de s’en saisir, aussi bien comme support et impulsion d’écriture que comme objet d’analyse.

Citons, entre autres ouvrages papier et projets numériques fondés sur l’utilisation de ces outils, Une traversée de Buffalo de François Bon ou Un mage en été d’Olivier Cadiot (Google Earth) ; Traque Traces de Cécile Portier (Google Maps) ; Dreamlands Virtual Tour d’Olivier Hodasava, Laisse Venir de Pierre Ménard et Anne Savelli ou encore Un lieu // quelqu’un (Google Globe Genie) de Christine Jeanney (Google Street View). Citons également des projets littéraires qui, utilisant des outils de géolocalisation, choisissent d’autres plateformes, Twitter et Instagram en tête, pour se déployer (voir le projet montréalais #dérives par exemple).

À l’invention de dispositifs narratifs et de procédés littéraires singuliers répond la présence thématique des cartes numériques au sein des récits, à l’instar des romans Programme sensible d’Anne-Marie Garat (2013) et GPS de Lucie Rico (2022), où elles jouent un rôle actanciel majeur.

Dans le cadre du projet de recherche « Littérature et cartographie » dirigé par Isabelle Ost à l’UCLouvain (site Saint-Louis), et dans la continuité des travaux pionniers menés par la Chaire de recherche du Canada sur les écritures numériques, le présent colloque entend examiner de quelle manière les auteur.e.s investissent les cartes sur écran dans leur travail d’écriture.

Parce qu’elles sont un de ces nouveaux outils numériques dont l’utilisation est extrêmement répandue, mais aussi parce qu’elles permettent d’interroger autrement la pratique cartographique, les cartes en ligne sont devenues un objet de l’imaginaire contemporain largement travaillé par les artistes, des arts plastiques (Charles Beauté & Juliette Goiffon, Nicolas Frespech) au cinéma (notamment dans les films de captures d’écran, où les images issues de ces services de cartographie numérique sont nombreuses) en passant par la photographie (Doug Rickard, Caroline Delieutraz).

Lorsque autrices et auteurs s’emparent à leur tour de ces cartes numériques constituées d’outils de navigation virtuelle, mais aussi de photographies ou d’images satellite, leurs créations croisent souvent les arts visuels, mêlant texte et images, captures d’écran et autres éléments iconographiques. Le caractère intermédial de ces objets littéraires s’inscrit dans un contexte plus général où les frontières entre la littérature et les autres arts ont tendance à s’amenuiser[2].

En outre, une part de ce travail littéraire ne passe plus par le livre imprimé, mais a lieu sur internet, réutilisant le langage même de la carte numérique ou de ses potentialités interactives. La poétique de cette littérature numériqueautour de la carte en ligne, tout comme l’écologie médiatique singulière dont elle dépend, méritent d’être analysées.

Quels gestes concrets – zooms, captures d’écran, fenêtrages multiples – opèrent-ils à leur contact ? Privilégient-ils une longue immersion dans une seule partie de la carte ou pratiquent-ils des mises en série significatives ? Utilisent-ils ces instruments au premier degré, en y recherchant simplement des informations spatiales, ou inventent-ils des usagesspécifiques, propres à les détourner de leur fonction première (encyclopédique, mais aussi commerciale lorsqu’elle appartient à un acteur privé) ? C’est en interrogeant la marge de créativité que laissent de tels outils, mais aussi leur processus d’« éditorialisation » spécifique (Marcello Vitali-Rosati), qu’on appréciera au plus juste la visée critique de l’auteur, qui « au cœur de la machinerie panoptique du web, se plaît à jouer les trublions » et « s’érige volontiers en cartographe déconstructeur[3]. »

Plus précisément, en quoi les cartes numériques renouvellent-elles la pratique et le paradigme de l’enquêtemarquant la littérature contemporaine ? Peut-on parler de terrain pour qualifier le monde virtuel au sein duquel l’écrivain évolue ? Quels espaces se trouvent particulièrement investis par les auteurs (la ville et ses périphéries, les zones rurales, les espaces naturels) ?

Du reste, observe-t-on une réelle désaffection de la carte papier ou l’attachement à ce support traditionnel est-il encore de mise ? Si tel est le cas, selon quelles modalités les deux supports coexistent-ils, dans des projets d’écriture comme « Pourquoi Pacifique » de Cécile Portier ? La frontière reste-t-elle étanche ou assiste-t-on à un brouillage, une fluidité particulière dans la manipulation des deux types de cartes ?

Dans une dernière perspective, plus épistémologique, les communications pourront se pencher sur l’usage que la recherche en littérature fait du mapping dans le contexte du développement des humanités numériques. Ce travail de géoréférencement des récits, effectué notamment par le biais des systèmes d’information géographique (SIG), entend en effet élucider la géographie romanesque de tel auteur, interpréter la création cognitive de l’espace par le lecteur ou encore renouveler l’histoire littéraire, dans le sillage des travaux fondateurs de Franco Moretti, Atlas du roman européen (1800-1900) (1997) ainsi que Graphes, cartes et arbres (2008).

*

 

Le colloque, qui se déroulera les 6 et 7 juin 2024 à Bruxelles (UCLouvain site Saint-Louis), s’intéressera aux littératures d’expression française. Il prendra une forme mixte donnant la parole tout autant aux chercheurs et aux chercheuses qu’aux auteurs et aux autrices contemporains.

Les propositions de communication (titre ; argumentaire d’une demi-page ; brève notice biographique) sont à envoyer avant le 15 janvier 2024 à litte.cartonumerique@gmail.com

Le colloque d’étude donnera lieu à une publication collective.

Comité organisateur et scientifique :

  • Aurélien d’Avout
  • Cécile Châtelet
  • Laurent Demanze
  • Isabelle Ost
  • Anne Reverseau

Bibliographie

  • Jean-Marc Besse et Gilles Tiberghien, Opérations cartographiques, Arles, Actes Sud, 2017.
  • Stéphane Bikialo, Anaïs Guilet et Martin Rass, Lectures digitales. L’écran au bout des doigts, publie.net, 2015.
  • Gilles Bonnet, Pour une poétique du numérique. Littérature et Internet, Paris, Hermann, 2017.
  • Serge Bouchardon (dir.), Un laboratoire de littérature : littérature numérique et internet, Paris, BPI Centre Pompidou, 2007.
  • Romain Buffat, « Dreamlands : Street View et des mondes possibles », Nouveaux cahiers de Marge, 2020/2, en ligne : https://publications-prairial.fr/marge/index.php?id=335
  • David Cooper et Gary Priestnall, « The Processual Intertextuality of Literary Cartographies: Critical and Digital Practices », Cartographic Journal, n° 48, vol. 4, 2011.
  • Henri Desbois, « La carte et le territoire à l’ère du numérique », Socio, n° 4, 2015, en ligne : https://journals.openedition.org/socio/1262
  • Nathalie Gillain, « Dreamlands Virtual Tour d’Olivier Hodasava : les images de Google Street View comme documents et miniatures », Phantasia, n° 13, « Décrire la carte, écrire le monde », dir. Aurélien d’Avout et Isabelle Ost, novembre 2023.
  • Olivier Hodasava, « Postface », Atlas puissance 100, Tiers Livre Éditeur, 2023.
  • Enrico Agostini Marchese, « Pour une esthétique géolocalisée : espace, imaginaire et littérature à l’époque du numérique », thèse soutenue à l’Université de Montréal, sous la dir. de Marcello Vitali-Rosati et Bertrand Gervais, le 21 octobre 2021, en ligne : https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/26262
  • Enrico Agostini Marchese, « Écrire l’espace : dynamiques d’imbrication performative de la photographie dans la littérature numérique », Nouveaux cahiers de Marge, 2020/2, en ligne : https://publications-prairial.fr/marge/index.php?id=323
  • Servanne Monjour, « Le panoptisme à l’ère de Google Earth », Mythologies postphotographiques(édition augmentée), Montréal, Presses de l’Université de Montréal,  En ligne : https://www.parcoursnumeriques-pum.ca/10-mythologies/chapitre13.html
  • Magali Nachtergael, Poet against the machine. Une histoire technopolitique de la littérature, Marseille, Le mot et le reste, 2020.
  • Isabelle Ost (dir.), Cartographier : Regards croisés sur les pratiques littéraires et philosophiques, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2018. En ligne : https://books.openedition.org/pusl/4415?lang=fr
  • Marcello Vitali-Rosati, On Editorialization: Structuring Space and Authority in the Digital Age, Amsterdam, Institute of Network Cultures, 2018.
  • Marcello Vitali-Rosati, « La littérature numérique francophone : enjeux théoriques et pratiques pour l’identification d’un corpus », Culture numérique, 2018, en ligne : https://blog.sens-public.org/marcellovitalirosati/la-litterature-numerique-francophone-enjeux-theoriques-et-pratiques-pour-lidentification-dun-corpus/
  • Marcello Vitali-Rosati et Servanne Monjour, « Littérature et production de l’espace à l’ère numérique. L’éditorialisation de la Transcanadienne. Du spatial turn à Google maps », @nalyses, vol. 12, n° 3, 2017, p. 198-229, en ligne : https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/19177

[1] À ce sujet, voir en particulier l’ouvrage d’Olivier Lumbroso, Zola, La plume et le compas. La construction de l’espace dans Les Rougon-Macquart d’Émile Zola, Paris, Honoré Champion, 2004, ou le projet de recherche « Carto-Hugo » mené par Delphine Gleizes à l’Université Grenoble Alpes.

[2] Pascal Mougin, Moderne/Contemporain. Art et littérature des années 1960 à nos jours, Paris, Les Presses du réel, 2019.

[3] Gilles Bonnet, Pour une poétique du numérique. Littérature et Internet, Paris, Hermann, 2017, p. 54.

Axe 3 – Projet « Langage, action, connaissance »

L’axe de recherche « langage, action et connaissance » vise à explorer des problématiques de philosophie du langage contemporaine dans ses rapports avec la philosophie de l’esprit et de la connaissance.Les recherches qui y sont menées s’ancrent dans l’héritage de la philosophie analytique inspirée notamment, mais pas exclusivement, des travaux de Ludwig Wittgenstein et de John L. Austin. Elles s’articulent donc autour de la question des usages du langage et de la façon dont l’étude de ces usages nous permet de modifier notre regard sur le monde et de comprendre autrement l’activité philosophique.

De ce point de vue, la philosophie est conçue comme une activité conceptuelle et une activité d’analyse des usages du langage à partir de notre point de vue immanent d’usagers du langage. C’est une philosophie profondément ancrée dans la pratique ordinaire, qui refuse l’idée d’une posture transcendante du discours philosophique et cherche à amarrer ce dernier à notre position de « locuteur compétent ».

L’analyse du langage doit, de ce point de vue, permettre de nous émanciper des embarras philosophiques émanant de la « pulsion de généralité » du philosophe ou des « sortilèges du langage », pour reprendre l’expression de Jacques Bouveresse. En effet, le langage peut nous jouer des tours lorsque nous prétendons employer un mot ou une expression en rompant avec ses usages ordinaires et sans néanmoins avoir fixé le sens nouveau que nous lui accordons. C’est le cas lorsque nous posons, sans les contextualiser, de grandes questions métaphysiques, comme par exemple « Qu’est-ce que l’identité ? », sans dire de quelle identité, de l’identité de quoi nous parlons.

Dans le sillage de cette philosophie du langage, l’axe « langage, action et connaissance » se subdivise en trois sous-axes, qui constituent autant de pistes de dialogue avec l’ensemble des traditions de la philosophie contemporaine, depuis la philosophie analytique jusqu’à la phénoménologie, l’herméneutique et la psychanalyse. En effet, si la philosophie du langage contemporaine s’inscrit historiquement dans l’héritage de la philosophie analytique et anglo-saxonne, les recherches menées dans le cadre de cet axe visent aussi à montrer que les enjeux philosophiques abordés dépassent les clivages d’écoles et permettent d’instaurer un dialogue fructueux au sein de la philosophie contemporaine, pour initier des problématiques nouvelles.

Les trois sous-axes problématiques sont :
(1) « Langage, sens, usages », qui traite plus spécifiquement de questions classiques de philosophie du langage et les articule à des questions sur la nature de l’activité philosophique ;
(2) « Pratiques, actions, intention », qui développe notamment des questions de philosophie de l’esprit et de l’action, mais aussi l’examen épistémologique des sciences humaines directement concernées par ces questions (psychologie, psychanalyse, anthropologie, etc.)  ;
(3) « Connaissance et connaissance de soi », qui s’intéresse à des questions relatives à la philosophie de la connaissance, aux modalités de notre rapport au monde et à nous-même. Ce faisant, il croise les questions développées dans le sous-axe 2.

Ces trois sous-axes ne sont en effet pas indépendants ni exclusifs les uns des autres ; pensons, par exemple, à la question des rapports entre le sens, le vouloir dire et l’intentionnalité, ou encore à la question du rapport des énoncés en première personne à la connaissance de soi, à celle des rapports entre dire et connaître le monde, ou encore à celle des rapports entre connaissance de soi et agentivité.
Les problématiques qui caractérisent ces trois sous-axes sont les suivantes :

Le premier sous axe, « langage, sens, usage », vise à articuler la question du sens et des limites du sens à la façon dont les usages du langage construisent et régulent ce sens. Ces recherches envisagent donc également des questions d’ontologie du sens : comment caractériser le « mode d’existence » de la signification ? Comment le sens émerge-t-il du langage et de ses usages ? Qu’est-ce que la signification ? Quel est son rapport à la référence ? Etc. Elles visent ainsi des questions plus générales comme celle de la nature des rapports du langage au monde, le langage n’étant pas nécessairement pensé comme une simple représentation du monde mais peut-être aussi comme faisant partie intégrante de celui-ci. Elles visent également des questions de méthode et de pratique de la philosophie, par une interrogation sur le rôle de l’analyse du langage en philosophie, sur ce qu’elle permet de construire philosophiquement et sur le dialogue qu’elle engendre avec les questions traditionnelles de la philosophie.
Le corpus de ce sous-axe se développe, de manière non-exclusive, à partir des travaux de Frege, Husserl, Wittgenstein, Austin, Anscombe, Ryle, Davidson, Deleuze, Travis, en revenant également à Aristote et aux réflexions des stoïciens et des médiévaux sur le langage.

Le deuxième sous-axe vise notamment à mettre en exergue les liens entre philosophie du langage, philosophie de l’esprit et philosophie de l’action à travers le concept central d’intention, étudié par Elizabeth Anscombe dans son ouvrage de 1957. Cependant, la portée de ce sous-axe ne se limite pas à cet héritage anscombien et vise plus largement à reposer certaines questions classiques de la philosophie sous l’angle d’une philosophie du langage. Notamment : quel type de lien lie l’intention à l’action qui la réalise ? Quel est le rôle du vouloir dire, d’une intention de signifier, dans la production du sens ? En quoi dire est-ce agir ? Dans quelle mesure la parole peut-elle modifier le monde et faire advenir quelque chose (par exemple, un engagement) ?

Il cherche également à développer des recherches sur les modalités de l’explication de l’action humaine et entre en ce sens dans un dialogue nécessaire avec les sciences humaines, qui développent également cette ambition. D’allure plus épistémologique, ce sous-axe rejoint certaines problématiques développées dans le sous-axe 3.

Le corpus de ce sous-axe se fonde non exclusivement sur les travaux de Anscombe, Austin, Wittgenstein, Sartre, Cavell, Descombes, mais aussi Freud, Meyerson, Elias, Foucault, Hacking, etc.

Le troisième sous-axe, « Connaissance et connaissance de soi », se penche plus spécifiquement sur des questions de philosophie de la connaissance, à travers, d’une part, la question épistémologique des modalités de notre rapport au monde, notamment dans sa médiation par le langage, et, d’autre part, la question des modalités de la connaissance de soi. Tandis que la première question soulève des enjeux relatifs à la philosophie du langage et de la perception (J.L. Austin, C. Travis, T. Crane, J. Benoist), la seconde question soulève en outre des enjeux relatifs au rapport à soi et l’expressivité de soi, notamment dans le discours sur soi (V. Descombes, R. Moran, Ch. Larmore). Elle vise aussi des questions d’ontologie du sujet.

8
décembre

Séminaire de lecture Langage, Action, Vérité - Anaïs Jomat (UCLouvain Saint-Louis - Bruxelles)

– 08/12/2023 – de 12:00 à 14:00

Salle P30, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

12
décembre

La philosophie analytique et le « Quartet d’Oxford » / Analytic Philosophy and the « Oxford Quartet »

– 12/12/2023 – de 09:30 à 17:30

Salle P02, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

12
janvier

Séminaire de lecture Langage, Action, Vérité - Mickaëlle Provost (UCLouvain Saint-Louis Bruxelles)

– 12/01/2024 – de 12:00 à 14:00

Salle P30, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

16
février

Séminaire de lecture Langage, Action, Vérité

– 16/02/2024 – de 12:00 à 14:00

Salle P30, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

15
mars

Séminaire de lecture Langage, Action, Vérité

– 15/03/2024 – de 12:00 à 14:00

Salle P30, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles.

1 2

Axe 4 – BildungLearning (projet ERC)

À l’intersection de l’histoire de la philosophie moderne et de la philosophie politique contemporaine, le projet BildungLearning entreprend de comparer la philosophie classique allemande de la Bildung (formation, culture de soi) et le paradigme contemporain de la Learning Society (société apprenante). En analysant ces deux paradigmes et leurs divergences conceptuelles, cette recherche financée par l’Union européenne pendant cinq ans vise à identifier et à mieux comprendre les mutations qui ont affecté l’idéal moderne de l’autonomie éducative – i.e. l’émancipation par l’auto-formation – et particulièrement la liberté académique de la fin du XVIIIe siècle jusqu’à nos jours.

Lire la suite.

Il n'y a pas d'événements

Axe 5 – Séminaire « Ecriture et témoignages »

Le témoignage écrit constitue un genre hybride au croisement de la fiction littéraire, du compte-rendu historique, de l’autobiographie, du journal intime, de l’essai historique ou de la réflexion philosophique sur la nature humaine. Dans « l’ère du témoin » actuelle (Wieviorka), où les témoignages se multiplient sous forme d’enregistrements audio ou vidéo, de textes et documents divers, notre attention se porte en premier lieu vers ceux qui, soumis au processus d’écriture, deviennent de véritables récits. Le séminaire de recherche « Ecriture et témoignage » entre dans sa seconde année de travail. Il se propose comme lieu de rencontre et de discussion interdisciplinaire autour d’un sujet destiné initialement aux chercheurs en littérature mais ouvert également à d’autres spécialistes : historiens, psychologues, juristes, linguistes, traducteurs. Une fois par mois, les organisateurs du séminaire invitent un(e) spécialiste dans un domaine de recherche spécifique et toujours différent, pour donner une communication en rapport avec la notion et la pratique du témoignage. Chaque conférence se prolonge par une discussion collective.

Le séminaire a désormais le statut de séminaire interuniversitaire, reconnu par l’Ecole Doctorale « Langues, Lettres et Traductologie » près le FNRS (ED 3)

Il n'y a pas d'événements

Axe 6 – Projet PDR « Iconologies, sensibilité, temporalité »

Ce projet, mené en collaboration avec les chercheurs en esthétique de l’Université de Liège, vise à rendre corps à l’expérience esthétique. La tradition iconologique, qui a innervé tout le champ de l’esthétique et de la philosophie de l’art au XXème siècle, a apporté une contribution à l’intelligibilité des œuvres qui reste essentielle. Mais pour autant, elle a payé le prix de cette intelligibilité d’un sacrifice de certains modes de la sensibilité dans le rapport aux œuvres. Le premier sacrifice a été celui des sens eux-mêmes. Ou plus exactement, des sens autres que la vision. Il s’est agi d’un isolement du regard esthétique, comme s’il n’avait pas partie liée à l’ouïe, au toucher, à l’olfaction. L’iconologie a ainsi notamment contribué à une occultation de toute dimension synesthésique. Mais corrélativement, en instituant ainsi le privilège de l’œil, l’iconologie a aussi tendu à consacrer celui-ci dans son univocité et son infaillibilité – le second sacrifice de l’iconologie. L’œil est-il incorruptible ? Certes non, et il faut bien plutôt faire droit à sa temporalité et à son historicité. Rendre corps à l’expérience esthétique, c’est dès lors à la fois restituer le visible dans son commerce avec les autres sens et penser le regard dans ses défaillances et limites qui sont constituantes de l’expérience esthétique.

Ce projet ne vise pas à disqualifier l’iconologie, mais à l’enrichir en la complexifiant : d’une part, dans la prise en vue d’expériences esthétiques contemporaines, en l’ouvrant à la synesthésie ; d’autre part, en remobilisant dans les textes fondateurs de l’iconologie ses ambiguïtés et son rapport à l’historicité et à la fragilité de l’intelligibilité des œuvres.

Il n'y a pas d'événements

Axe 7 – Projet ARC Autonomicap

 

 

Le 1er octobre 2019 a marqué le coup d’envoi du projet de recherche AutonomiCap (« L’autonomie à l’épreuve du handicap, le handicap à l’épreuve de l’autonomie »), qui bénéficie d’un financement ARC (action-recherche-concertée) pour cinq ans (2019-2023). La problématique centrale de ce projet consiste à analyser, par le biais d’une approche interdisciplinaire, de quelles manières la montée en puissance des références à l’autonomie transforme les objectifs et les modalités des politiques publiques à l’égard des personnes en situation de handicap.

Le projet est porté par une équipe interdisciplinaire de l’Université Saint-Louis Bruxelles, qui réunit les trois doctorant.e.s (Sophie De Spiegeleir, anthropologue, membre du Casper et du CESIR ; Noémie Rimbourg, anthropologue, membre du Casper et du CESIR ; Louis Triaille – juriste, membre du Circ et du Grepec) et les six promoteurs du projet (Valérie Aucouturier – philosophe, membre du Centre Prospero ; Yves Cartuyvels – juriste et criminologue, membre du Grepec et du CESIR ; Abraham Franssen – sociologue, membre du CESIR ; Isabelle Hachez – juriste, membre du Circ ;  Nicolas Marquis – sociologue, membre du Casper ; Yannick Vanderborght, politologue, membre du Crespo) ; un.e post-doctorant.e viendra prochainement renforcer l’équipe. Au total, l’équipe de recherche a vocation à constituer un pôle d’excellence en disabilities studies au sein de l’université Saint-Louis-Bruxelles (USL-B).
Dans sa dimension philosophique, il s’agit de confronter (en lien avec les recherches menées dans le cadre de l’axe « Langage, Action, Connaissance » du Centre Prospéro) l’analyse conceptuelle de la grammaire de l’action (volonté, intention, responsabilité, autonomie, hétéronomie, responsabilité, irresponsabilité) aux cas limites de l’agir qu’étudient les enquêtes empiriques et textuelles menées dans le cadre du projet AutonomiCap sur la mesure et les critères d’évaluation de l’autonomie et du handicap.

Pour en savoir plus : https://autonomicap-usaintlouis.org

Il n'y a pas d'événements

Axe 8 – Groupe de recherches Castoriadis

 

Le Groupe de Recherches Castoriadis se donne pour objectif de favoriser un débat interdisciplinaire vivant autour de la pensée de Cornélius Castoriadis. L’oeuvre de Castoriadis nous semble aujourd’hui trop peu connue au regard de la richesse conceptuelle qu’elle recèle et de l’intérêt qu’elle peut dès lors représenter pour d’autres courants philosophiques et pour la plupart des sciences humaines. Elle nous paraît pouvoir enrichir de nombreux débats actuels dans le champ de la philosophie, des études littéraires, de la linguistique, de la psychologie, de l’anthropologie, de l’histoire, des sciences sociales et politiques, des sciences juridiques. Elle est susceptible de favoriser la rencontre interdisciplinaire entre des thématiques de recherches naturellement trop enserrées dans des champs scientifiques institués. Il ne s’agit donc pas pour ce Groupe d’entamer un travail hagiographique ni de développer une activité de recherche concentrée exclusivement sur les textes de Castoriadis, mais bien de profiter des nombreux enjeux de cette oeuvre pour en faire un objet de débat et l’un des outils de la pensée contemporaine.
Le Groupe de Recherches Castoriadis prend en charge la publication des actes des journées d’étude qu’il organise, sous la forme de « Cahiers Castoriadis ».

Il n'y a pas d'événements

Axe 9 – Organisations des doctorants et organisations en partenariat

Séminaire international « Positions, genres, pouvoirs » : année académique 2023-2024

Ce cycle de conférences est organisé en partenariat avec l’Ecole doctorale Arts, Lettres, Langues (ALL) des Pays de la Loire et de Bretagne.
Le programme élaboré consiste en une conférence longue d’un chercheur, suivie d’un débat animé par un répondant, en vue de favoriser la réflexion dans les domaines des lettres, langues, linguistique, philosophie et arts sur les problématiques suivantes :
– Comment la position énonciative est déterminée par des coordonnées historiques ou genrées ; la question de la lecture située, des tensions entre objectivité et subjectivité, des voix et des points de vue ; ce qu’il en est de la réception : gender et acte de lecture ;
– Comment renouveler le regard sur des formes littéraires ou artistiques en les considérant sous l’angle du rapport au(x) pouvoir(s) ou à l’opinion publique ; censure, répression, subversion, provocation en art ; les ressources et les stratégies contestataires du contournement (le silence, la clandestinité) ; la doxa, le consensuel, la légitimité implicite ;
– Quand la représentation se fait pouvoir : les dispositifs de représentation, les modalités de prise en charge par le discours de figures historiques dévaluées en quête de légitimité ou de droit d’expression (femmes de pouvoir, « déviants », membres de « minorités ») ; faire voir, faire croire : la perception de la « force » des mots et des images, les manipulations et les réorientations.

Les séances sont enregistrées et peuvent être visionnées :